Un mois déjà. Un mois pour digérer la triste nouvelle de la mort de Paco. Un mois à réécouter toute sa discographie. Un mois à regarder les vidéos de ses concerts, les reportages sur lui. Un mois à lire les articles, livres, interviews, biographies, hommages. Un mois ce n'est pas assez pour retracer toute la carrière de Paco. Un mois ce n'est pas assez pour oublier.
Francisco Sánchez Gómez alias Paco de Lucía, guitariste flamenco, né en 1947 à Algeciras - Province de Cadiz, Espagne -, nous a quitté le 25 février 2014 à Cancun au Mexique. Franchement, « Tu nous laisses inconsolables » dans le monde entier.
Le « Super Héros » de la guitare flamenca, qui n'en était pas un, est parti laissant le flamenco, aux dires de tous, sans phare et sans lumières... Mais une chose est sûre, l'héritage légué par le Maestro, le « Dios de la guitarra » est inestimable et à la portée de tous. Son apport au langage du flamenco, la simplicité de ses aspirations/exigences. Manolo Sanlucar disait de lui : « Paco savait toucher même celui qui n'y entendait rien. » La musique de Paco a touché et a été saluée par un vaste auditoire dans le monde – les Etats-unis et l'Amérique ont été pour beaucoup dans sa popularité internationale. Nul n'est prophète en son pays, mais lui a su s'imposer avec sérénité dans la musique espagnole. Il reçoit même une des plus hautes distinctions en Espagne, Prince des Asturies, et Mondiales, Honoris causa. Son talent demeure reconnu bien au-delà du flamenco et de l'Espagne. Dans son parcours, la nécessité, la discipline, la droiture et la rigueur ont solidifié une exigence et permis l'invention et la liberté. Paco a laissé un héritage musical sans précédent dans la musique.
Avec lui, il y aura bien eu un Avant et un Après . 90 % de travail et 10% de duende, mais quel duende !
Le parcours du maestro est passionnant, beaucoup de films, documentaires et d'ouvrages, articles, lui ont été consacrés. En réécoutant toujours avec le même enchantement sa musique, nous avons tiré au hasard les lettres de son nom et les mots qu'ils évoquent. Un chapelet de tags à lire en écoutant Paco...
Nous avons recueilli les propos de Katia Ochmiansky, amie de longue date de Paco de Lucía, qui l'a connu lorsqu'il avait 20 ans et l'a accompagné lors de plusieurs tournées et toujours vécu ses concerts depuis les coulisses. Katia est également co-fondatrice de la Peña Flamenco en France et a travaillé dans l'organisation de spectacles. Elle était l'une des rares femmes à jouer de la guitare flamenca à l'époque des débuts de Paco.
Notre autre source principale est le documentaire de Daniel Hernandez et Jesus de Diego, produit par Alea TV, TVE S.A et ARTE G.EI.E, et Pablo Uson.
Joaquin Grilo [18 novembre 2011]
Avoir sur son CV une expérience avec Paco de Lucía c'est quelque chose de génial, quelque chose que beaucoup souhaiteraient. J'ai eu la chance d'être avec ce génie qui est le drapeau du flamenco parce qu'il a changé "La tortilla" comme on a l'habitude de dire dans le flamenco, dans le bon sens et il continue de le faire.
Pour moi qui aime m'imprégner des autres et boire de tout, le fait que le maestro m'appelle, étant mon idole, ce qu'il est pour tous... durant les six ou sept années où je suis resté avec lui je me suis plus consacré à absorber son énergie qu'à danser, à essayer d'engranger tout ce que je pouvais, aussi bien de lui que des autres grands musiciens qui étaient avec lui, de Carlos Benavent, Jorge Pardo, Rubem Dantas, Cañizares, José Maria Bandera, le maestro Ramon de Algeciras, Pepe de Lucia, Duquende... de tant d'artistes qui sont passés par ce sextet si important pour le monde du flamenco en général.
Je crois que cela a donné un bagage, une base fondamentale à ma carrière pour voir les choses d'une autre manière, alors je suis très reconnaissant au maestro pour cela.
Juan Carmona [1er avril 2010]
Paco de Lucía c'est le tronc d'arbre, et après il y a toutes les branches. Paco a laissé une influence énorme sur tous les guitaristes. Le pourcentage qui correspond à la personnalité pour moi est beaucoup plus petit. Moi j'essaye d'amener ça sur mon terrain, avec toutes les influences que j'ai eues au niveau de la musique classique et orientale, avec le jazz ou avec d'autres musiques. Mais il est évident que mes premières écoutes ont été Paco de Lucía. Comme Vicente, comme Tomatito, ils ont tous écouté Paco de Lucía. Après chacun de nous essaye d'avoir sa propre personnalité, mais le tronc d'arbre il est évident que ça reste Paco de Lucía.
Jorge Pardo [17 juillet 2009]
Mon histoire est un peu curieuse dans le sens où mes instruments, quand j'ai décidé de jouer de la flûte et du saxophone, n'étaient pas dans le monde du flamenco. Les artistes (de jazz) que j'écoutais à l'époque faisaient une musique incroyable, il m'avaient captivé dans ma tendre jeunesse, et donc logiguement, j'ai appris et tenté d'apprendre leur musique. Mais mon aficion pour le flamenco a toujours été présente et ma rencontre avec Paco de Lucía a été vitale pour la suite. J'avais 17 ans quand j'ai rencontré Paco, et à partir de là je me suis rendu compte qu'il y avait des instruments comme la flûte et le saxophone qui participaient à ce langage, et j'ai travaillé ainsi de nombreuses années avec le sextet de Paco de Lucía, et bien sûr avec Camaron à mes débuts. J'ai eu de bons maîtres, et c'était impossible de ne pas chanter ce langage et ce message.
Juan Manuel Cañizares [8 juillet 2009]
Son apport a été immense. Ce qu'a apporté le maestro Paco de Lucia à la guitare est incroyable.
Grâce à lui nous jouons de la guitare, grâce à lui il y a des festivals de flamenco au sein desquels on inclut la guitare flamenca comme guitare de concert. Je ne pourrai décrire tout ce qu'il a apporté mais il a fait un travail incroyable.
José Valencia [11 avril 2008]
Je ne sais pas dans quel domaine on peut parler de fusion, par rapport au flamenco qui se fait aujourd'hui. Fusionner avec d'autres musiques, ce n'est pas une question de se mettre à chanter et jouer avec une autre personne. Je pense que pour faire de la fusion il faut d'abord se compléter. Je crois que le meilleur à avoir fait de la fusion est Paco de Lucía. Car en plus d'être un bon guitariste de flamenco, un connaisseur de la guitare et le meilleur tocaor de l'histoire, il a su se mélanger avec des musiciens d'autres pays, avec d'autres musiques, et arriver à une connaissance complète des autres musiques, il a trouvé comment ouvrir l'harmonie, comment connaître les temps rythmiques...et ça oui, c'est de la fusion.