Enrique Morente a sauvé la soirée de clôture du Festival Banlieues Bleues qui avait lieu le 16 avril à la MC 93 de Bobigny en assurant sans ses musiciens habituels un récital d'une heure vingt devant une salle comble d'aficionados venus assister à cet événement exceptionnel.
Terrible nouvelle vendredi en début d'après-midi : Miguel Poveda ne chantera pas lors de la soirée de clôture du Festival Banlieues Bleues.
En effet, en raison du nuage de cendres qui stagne dans le ciel européen suite à une éruption volcanique en Islande, le trafic aérien a été totalement interrompu dans
les aéroports parisiens et les musiciens du badalonais n'ont donc pu décoller d'Espagne. Enrique Morente, dans le même cas de figure,
décide cependant de maintenir son récital. Il sera accompagné par la guitare de son ami Antonio Maya "El Cotorrero", guitariste de Grenade issu d'une grande dynastie gitane,
qui vit en région parisienne depuis de nombreuses années. Le chanteur/guitariste Pablo Gilabert en deuxième guitare complète cette formation improvisée d'un soir.
Le concert débute dans le noir quasi complet avec le martinete de l'album "Morente sueña La Alhambra", à trois voix, celles d'Enrique Morente,
Paco El Lobo et Pablo Gilabert. Très belle intervention de Paco El Lobo sur ce morceau.
Morente rejoint ensuite sa chaise, accompagné de chaque côté par une guitare pour interpréter les alegrias "esa rosa" qu'il avait enregistrées avec
Sabicas dans l'album "Nueva York - Granada" avant la disparition du légendaire guitariste, un thème à la saveur d'ida y vuelta assez marquée, mais sans
le tirititran du disque en temple. Suit une longue série de cantes abandolaos dont un verdial cordobés, puis des tientos divinement interprétés.
Enrique Morente poursuit son récital avec la granaina-malagueña "por buscar la flor que amaba", un grand classique interprété de façon à la fois
traditionnelle et personnelle, avant d'enchaîner por soleares de Joaquín el de la Paula et de Cádiz, magnifique. La liviana est sans conteste
l'un des meilleurs moments du récital, tout comme le martinete semblable à celui d'ouverture qui conclut le récital. Un rappel por fandangos et tangos finit de convaincre le public
de l'immensité de l'artiste.
La déception était grande parmi les aficionados n'ayant jamais eu la chance d'écouter Miguel Poveda en direct, d'autant que nombre d'entre eux avaient choisi
de ne pas aller à Evry le 13 avril, pensant voir le cantaor à Bobigny. Mais la générosité de Morente, véritable tête d'affiche du concert, a permis de sauver
cette grande soirée de cante tant attendue et rappelle que le flamenco c'est aussi de l'improvisation et donc du risque. Du bon "flamenco en directo",
titre du dernier album du grenadin, qui d'après ce que nous a confié son manager José Manuel Gamboa à Jerez, prépare un nouvel album live qui fera à coup sûr vivre un moment exceptionnel à celles et ceux qui n'ont pas pu assister au concert de Bobigny qui s'est tenu à guichet fermé.
En mars 1997 Enrique Morente avait dû annuler à la dernière minute son concert dans le cadre du festival Banlieues Bleues pour des raisons médicales.